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Tératologie et tallage chez les palmiers

A l'exception notoire du genre Hyphaene, tous les palmiers ont la même manière de pousser. Ils élaborent une structure fibreuse et rigide aux entre-nœuds très courts : le stipe qui peut être souterrain ou aérien ; ce stipe va s'allonger tout au long de la vie de la plante sans jamais se ramifier. C'est un seul et même méristème disposé au sommet de la plante qui initiera de nouvelles feuilles pendant que les feuilles les plus anciennes vont sécher et retomber.
Suite à un traumatisme quelconque, ce Livistonia s'est mis à développer 9 axes grêles au dessus de son départ de stipe
Il peut arriver, rarement, qu'un palmier se mette à initier plusieurs têtes. Ce comportement est contraire au modèle architectural non ramifié de la plante. Pour être tératologique, une difformité ne doit pas être la conséquence normale de facteurs environnementaux anormaux, mais bien résulter de lésions traumatiques dans les tissus primordiaux du végétal : destruction partielle ou totale du méristème végétatif ou altération profonde des tissus jeunes dans le cas de tératologies foliaires.

On peut expliquer ces observations par diverses hypothèses concernant le devenir du bourgeon végétatif du palmier. Ce dernier peut simplement disparaître et être exceptionnellement relayé par des bourgeons latéraux à l'aisselle des feuilles. Toutefois, ces bourgeons ont tous un devenir floral, il leur faut donc retrouver des aptitudes végétatives ; cela a été montré sur Elaeis guineensis lors de perturbations physiologiques importantes.
Le méristème terminal peut être endommagé et non détruit totalement, il donnera potentiellement plusieurs points de croissance au lieu d'un seul.
Il est envisageable que le développement de plusieurs têtes d'un palmier soit dû, par fasciation, à une affection virale. La fasciation provoque l'élargissement de la tige par augmentation anarchique des hélices foliaires, une tige peut alors se ramifier pour récupérer une structure phyllotaxique stable. La photographie ci dessous, à droite, illustrant un Phœnix roebelenii multicéphale a été prise à l'hôtel Bahia près de San Diego (Californie), le jardinier imputait ce phénomène à un traumatisme physique du palmier. Cependant, plusieurs palmiers dans le même jardin présentaient le phénomène, il n'est pas impossible que la cause soit effectivement virale.

Phœnix robelenii développant un nombre important de ramifications.Hôtel Bahia, San Diego (Californie).
Photo Philippe Duhamel

Phœnix dactylifera tératologique. Huerto del Cura (Elche)
Photo Gérard Loison

formation tératologique
Yucca aloifolia normal

Yucca donnant des signes de tératologie :
1 - Dernière feuille initiée par le méristème terminal.
2 - plus aucune jeune feuille n'apparaît, la croissance apicale est bloquée.
(Cliquer pour agrandir)

Yucca aloifolia au comportement normal, cette plante n'initie aucune ramification
Développement de 3 bourgeons axillaires
A la fin de l'été, trois bourgeons à l'aisselle de feuilles anciennes reprennent le relai de la croissance apicale.
Ce Yucca se développera donc sur 3 têtes, bien avant que toute floraison l'ait conduit à se ramifier.
Certains palmiers dont le port est cespiteux forment des colonies par tallage en émettant des structures stolonifères souterraines qui vont émerger du sol relativement près de la plante mère et d'où des feuilles vont émerger. Les rejets vont ensuite gagner leur indépendance trophique en formant un système racinaire adventif. De nombreux palmiers forment ainsi des structures coloniaires de plusieurs stipes : Phœnix dactylifera, Chamaerops humilis, etc.
Le tallage correspond au développement normal de certains palmiers et n'a pas de rapport avec les formations tératologiques
Formation de rejets au pied d'un jeune Chamaerops humilis
La ramification tératologique est souvent provoquée par le froid et l'excès d'humidité au niveau du bourgeon, il est possible, quoique très difficile de tenter de faire brancher un palmier en infligeant des dommages mesurés au méristème ; en coupant la tête à une certaine hauteur ou alors en empêchant les nouvelles feuilles de pousser par pose d'une pierre lourde au sommet du palmier. Certaines substances chimiques tératogènes appliquées sur le cœur du palmier peuvent provoquer des trauma au niveau des feuilles, ou, avec un peu de chance au niveau du bourgeon terminal : certains savons comme le nonylphénol polyethoxylé. Les tentatives d'obtenir un palmier rameux se soldent très souvent par un échec, voire par la mort de la plante.
Voir d'autres palmiers multicéphales